Introduction

La technologie des réponses impulsionelles (Impulse Response ou IR en Anglais) est devenue extrêmement populaire dans la communauté des guitaristes qu’ils soient amateurs ou professionnels. Cette technologie permet de créer une prise de son virtuelle et d’appliquer cette prise de son à votre propre matériel, que cela soit en studio, home-studio ou encore en live. Elle est présente dans une large palette de solutions matérielles et logicielles destinées aux guitaristes et autres ingénieurs-son. Cette série d’articles s’adresse aux débutant(e)s et plus particulièrement à celles et ceux qui pratiquent la guitare avec des sons saturés. Suivez le guide …

Introduction aux IR

Les réponses impulsionelles se présentent sous la forme de fichiers audio (wav, aiff) de courte durée (de 18 ms environ à 50, 100, 200 ou encore 500 ms). Ils se basent sur des méthodes mathématiques de convolution et déconvolution. En capturant un signal et en y appliquant les méthodes de convolution, on obtient une empreinte audio : la réponse impulsionelle.

La convolution permet ensuite de combiner plusieurs signaux en réalisant la multiplication d’un signal par un autre : l’IR sera utilisée à la manière d’un filtre. Dans notre domaine, cela permet de combiner deux signaux : votre signal d’ampli ou de préampli de guitare et l’IR qui présente l’empreinte de la prise de son, comme si vous aviez la possibilité de jouer directement sur le matériel capturé.  Cela vous permet de bénéficier d’une palette sonore extrêmement vaste et variée, d’accéder à de très nombreux matériels (enceintes de guitares, hauts-parleurs, micros) et de les combiner à l’infini.

Des fichiers IR sous Audacity

La génération d’une IR s’effectue à l’aide d’un logiciel dédié en diffusant et en capturant un signal qui permet de couvrir toutes les fréquences audio. Deux méthodes sont utilisables : soit le coup de feu d’un pistolet de starter (impulsion) -plutôt dans le cas d’IR de reverbération- soit un signal sinusoïdal qui va permettre de balayer l’ensemble des fréquences et de construire la réponse impulsionnelle.

IR : principe de capture

Pour simplifier, on caractérise la plupart du temps l’IR par les deux éléments qui ont le plus d’impact sur l’enregistrement : l’enceinte et le micro utilisé pour la capture, par exemple Mesa Boogie Recto 412 / Shure SM57.

Pour pouvoir l’utiliser, vous aurez besoin soit d’un ordinateur et d’un logiciel dédié soit d’un matériel capable de les mettre en oeuvre : pédalier guitare multi-fonction, pédales dédiées, ou encore une load-box supportant les IR. Les simulateurs logiciels d’amplificateur de guitare embarquent très souvent une section chargée d’appliquer la réponse impulsionnelle.

Les riffs et cover partiels présentés ici en exemple le sont à des fins éducatives (utilisation d’amplificateurs et de réponses impulsionnelles ). Ces riffs et morceaux demeurent la propriété des détenteurs des droits d’auteurs.

A l’usage, cela permet d’obtenir des sons réalistes et variés. Voici un extrait d’un cover de Metallica – The God That Failed réalisé avec des IRs maison:

Metallica The God That Failed – IR demo

Mise en oeuvre

Pour utiliser ces IRs vous aurez donc besoin d’un chargeur de réponse impulsionnelle (Impulse Response Loader) dans lequel vous allez envoyer votre signal de guitare amplifié (mais ramené au niveau ligne) ou votre signal de préamplificateur qu’il soit matériel ou logiciel.

Le chemin de signal classique pour une guitare saturée ressemble assez souvent à ceci : 

Chemin du signal

En général, on retrouve donc :

  • la guitare 😉
  • une pédale d’overdrive ou de boost (pas obligatoire mais fréquente pour l’obtention de sons saturés)
  • l’ampli guitare (qui combine préampli et ampli de puissance dans la majorité des cas)
  • l’enceinte de guitare
  • et -dans le cas ou vous enregistrez- l’ensemble nécessaire à la prise de son, à commencer par le micro

L’emploi des réponses impulsionnelles sera fonction de votre matériel, et de très nombreuses possibilités existent.

Dans la figure ci-dessous, le chargeur de réponse est logiciel, et il est fréquemment chargé sous forme de plugin à l’intérieur d’une STAN:

IR gérées par logiciel

Dans le chemin “DI” ci-dessus, le signal direct de la guitare est capturé et tout le reste du signal passe par une simulation : ampli et IR. Dans les deux autres cas, on a :

  • un signal de préamplificateur envoyé à la carte son, puis on passe dans le chargeur d’IR
  • un signal d’amplificateur ramené au niveau ligne par une load box pour être envoyé à la carte son, puis on passe dans le chargeur d’IR

Dans la figure suivante, des solutions hardware sont présentées (loadbox, chargeur format pédale, multi-effets):

IR gérées par matériel

Sur l’image ci-dessus, vous retrouvez pêle-mêle :

  • Une load box Torpedo Live (Two-Notes) embarquant la simulation d’enceinte
  • Une pédale Torpedo Cab M (Two-Notes), chargeur format pédale
  • Une pédale Mooer Radar, chargeur format pédale
  • Un pédalier multi effets Headrush
  • Un pédalier multi effets Line6

Attention : 

  • ne branchez jamais la sortie enceinte (OUT, CAB, X ohms) d’un amplificateur vers un dispositif de niveau ligne (carte son ou pédale)
  • Branchez toujours une enceinte d’impédance adaptée à votre ampli ou un simulateur de charge d’enceinte (loadbox) à votre amplificateur*.

*A moins que l’ampli ne dispose d’une charge intégrée : cela sera mentionné explicitement par le fabricant (par exemple Laney IRT Studio) et c’est assez rare pour les amplis à lampe

Quelques démos

Le résultat obtenu sera convaincant et correspondra à vos attentes :

  • si vous utilisez une configuration adaptée au son recherché (matériel, chaine et niveau du signal, effets, sélection méticuleuse des IR, égalisation) et à votre contexte ou application (entrainement, cover, jeu en live, tracking, mix d’enregistrement,…)
  • et si vous adaptez votre configuration à votre dispositif d’écoute (moniteurs de studio ou home studio, casque, intra, enceinte FRFR) : ils ont tous une coloration / des déformations plus ou moins fortes sur certaines parties du spectre sonore et le rendu sera également très sensible au volume d’écoute.

A titre d’exemple, voici quelques extraits réalisés avec des IRs:

Nazgul C Tuning Amon Amarth Crack the Sky riff IRT Two-Notes KEROZEN SM57

AHB3 Drop-B demo IRT Two-Notes GREENTRI DynBass52

AHB3 Drop-B demo IRT Two-Notes UBER75 SM57

AHB3 Drop-B demo IRT OwnHammer DZL V30 SM57

AHB3 Drop-B demo IRT Overdriven.fr Fatboy G12K100 E906

EMG81-EMG85 Slayer Season in the Abyss intro IRT Overdriven.fr Recto 112 SM57

Bénéfices et inconvénients

L’utilisation des IRs va vous permettre : 

  • d’accéder à une très large palette de CABs, de hauts-parleurs, de micros -certains micros ou enceintes peuvent être extrêmement onéreux- et positions d’enregistrements (essentiel en metal) et donc une immense palette sonore 
  • de bénéficier du savoir-faire du preneur de son : faire sonner un CAB en guitare saturée peut  nécessiter pas mal de temps et d’essais (connaissance des micros et des hauts-parleurs, positionnement, gestion de l’effet de proximité…)
  • de réaliser des enregistrements silencieux (!) sans la contrainte de la prise de son : le volume sonore, la reverb de la pièce d’enregistrement, la position du micro, les corrections, … 
  • d’obtenir des sons variés et reproductibles dans tous les contextes, sans dépendre des conditions réelles d’une prise de son
  • de changer de son en un clic de souris ou de pédale
  • de sculpter le son d’une manière beaucoup plus complète et rapide que sur une véritable prise de son

Mentionnons quelques inconvénients : 

  • pour en tirer parti et obtenir un résultat qui vous satisfasse, il sera nécessaire de faire un petit apprentissage pour maitriser la chaine de signal et comprendre les caractéristiques sonores des IRs…
  • Vous êtes tributaire des choix réalisés par le preneur de son lors des captures d’IRs et vous n’aurez pas une aussi grande liberté (placement, réglages) que lors d’une prise de son réelle
  • Et bien entendu vous serez tributaire de la qualité des IRs que vous utilisez et de leur adéquation à vos objectifs

Les enceintes de guitare jouent un rôle prépondérant dans le rendu sonore final : les résultats obtenus grâce aux IRs sont plus que réalistes sur des enregistrements ou en live au prix d’un peu de travail de configuration (choix des IRs, réglages.). Il est quasiment impossible de les distinguer d’une prise de son réelle.

CAB vs CAB+mic

Mes premiers essais avec la technologie des IRS furent frustrants et décevants et bien loin de que l’on peut entendre sur les démos Youtube. La première erreur est de penser qu’en jetant un CAB Mesa et un SM57 cela sonnerait forcément bien…. : erreur !

En premier lieu, les IRs reproduisent un enregistrement (CAB+MIC) : pour obtenir le son “dans la pièce” (CAB) ou le son qui vous plait, il va falloir faire des choix et travailler un petit peu les réglages.

En second lieu, un ampli guitare couplé à un vrai CAB reste, en live ou en studio, un dispositif produisant une grande présence sonore et capable d’une très forte dynamique. Pour les IRs, le dernier maillon de la chaine (l’enceinte FRFR, le monitor, la sono ou votre casque) joue également un rôle critique pour assurer un résultat satisfaisant.

Ou trouver des IRs ?

On trouve quelques collections d’IRs gratuites sur le Web mais l’essentiel de l’offre est payante. Parmi les fournisseurs les plus populaires, citons pour les fans de métal (mais pas que): 

  • Two-Notes Engineering
  • OwnHammer
  • RedWirez

Mais de nombreuses autres sociétés proposent également des IRs : 

  • Celestion
  • Fat Lazy Cab
  • Rosen Digital
  • 3 Sigma Audio
  • Lancaster Audio
  • Chop Tones
  • SinMix 3
  • Kalthallen Cabs
  • Frozen Sun Audio
  • Trackmix Studio
  • GuitarHack
  • Ryan Harvey Audio

Des versions partielles sont souvent accessibles gratuitement à titre de démo (OwnHammer, Celestion,…) . Un grand coup de chapeau à Two-Notes: l’accès au store (“La Boutique”) est possible directement depuis les logiciels Torpedo Remote et Wall of Sound: cela permet de sélectionner toute IR du store pour audition sur votre matériel (avec coupure toutes les X secondes) avant d’éventuellement les acquérir.

Les simulateurs d’ampli (Overloud,  BiasFX, BiasAmp, Mercuriall, TSEX50,…) incorporent aussi des collections d’IRs, en nombre souvent plus limité.

Les offres sont généralement déclinées par enceinte et micros associés, avec la plupart du temps un ensemble de positions de micros : 

  • Mesa 4×12 / Sm 57 / position 1, 2, 3, ….
  • Mesa 4×12 / Royer 121 / position ….
  • Orange 2×12 / Sm 58 / …
  • Diezel 412 / MD 421

Les distances et positions des micros ne sont pas toujours clairement explicités, vous disposez parfois juste d’un nom de fichier, au libellé plus ou moins évocateur…  Chez certains fournisseurs, la position du micro peut être sélectionnée graphiquement ou par définition de paramètres approchant ou éloignant le micro ainsi que sa position en face du haut-parleur, permettant ainsi de le centrer ou de le décentrer.

Placement graphique du micro dans Wall Of Sound / Two-Notes

Conclusion

Les IRs permettent de disposer d’une palette de choix très étendue, d’accéder pour quelques euros à des configuration matérielles parfois couteuses (et encombrantes !), le tout dans une qualité professionnelle (avec les bonnes IRs !).Elles ont révolutionné la prise de son pour les guitaristes et permettent un reamping à l’infini. Les prochains posts détailleront les techniques pour en tirer le meilleur parti.