Mise à jour : 4 Avril 2020

Introduction

J’ai fait l’acquisition toute récente de cet ampli à lampes, étant amateur du son Randall et étant assez séduit par le voicing de l’ampli, qui transparait dans les rares démos Youtube disponibles. Je l’avait repéré depuis quelques temps déjà et j’ai découvert que Randall avait resserré sa gamme d’amplis fin 2019 : avaient disparu les 667 (haut de gamme), le Satan (la collaboration avec Ola Englund a pris fin) et l’EOD 88. J’ai donc sauté le pas et décidé de m’en procurer un modèle d’occasion.

Un mot sur Randall

Randall fait partie des constructeurs historiques d’ampli à transistors et à lampes dédiés au métal. Fondé en 1970 par Don Randall (qui fut président chez Fender et participa à la création et au lancement de noms tels que Telecaster , Stratocaster, Bassman ou Twin Reverb), la marque se spécialisa au début dans le développement d’amplis à transistors. De nombreux artistes figurent parmi les utilisateurs d’ampli Randall : Kirk Hammett (Metallica), Scott Ian (Anthrax), Georges Lynch, ou encore Dimebag Darell de Pantera…..

Randall a collaboré avec des concepteurs d’amplis tels que Bruce Egnater (qui fonda ensuite sa propre marque) et plus récemment avec Mike Fortin (https://www.fortinamps.com) qui fut responsable de la conception des amplis Randall de 2011 à 2015 et qui a conçu ou participé à la conception de l’ensemble des amplis à lampes disponibles actuellement chez Randall (les 667, KH 103, le Thrasher, le Satan, ou encore la série Diavlo). L’EOD 88 fait partie de cette génération d’amplis et sa commercialisation officielle à cessé (il n’est plus dans le catalogue en ligne de Randall, mais il est encore proposé à la vente chez quelques vendeurs et en occasion—au 1er Mars 2020-).

You are doomed (EOD 88 introduction)

A l’origine, le coté exubérant et le positionnement résolument doomesque de l’engin avait plutôt commencé par me refroidir (EOD : Element Of Doom).

Et puis, plus récemment, je me suis ré-intéressé aux amplis Fortin, à leurs particularités, leurs sonorités et à leurs déclinaisons chez Randall, notamment le Thrasher et le Satan. De fil en aiguille je suis retombé sur l’EOD 88 et les démos m’ont tapé dans l’oreille….

Amateurs de sobriété et de discrétion, abandonnez tout espoir : le rouge du tolex et le dessin de la façade – qui est en acier, au passage – annoncent la couleur : c’est un ampli définitivement dédié au gros son.

Caractéristiques : 

  • ampli à lampes 1 canal (ou un canal et demi si on ajoute la fuzz)
  • 2 modes de gain (normal et boost)
  • 1 fuzz embarquée, qui se combine au réglage de gain
  • 1 section d’égalisation bass, middle, treble
  • 1 depth et 1 presence
  • 1 gros potentiomètre de master 
  • 3 lampes 12AX7 en préampli 
  • 2 lampes de puissance KT 88 qui délivrent …. 88 watts
Lampes de puissance
Lampes 12AX7 (arrière plan)

Il est made in China, et est très bien construit et fini. Il dispose de deux gros transformateurs qui inspirent confiance.

Un des deux transformateurs
Poignée et grille de dissipation

Poids et taille :

  • Poids : environ 15 kg
  • Dimensions : L:H:P 51,5 cm x 25,5 cm x 23,5 cm

A l’arrière on retrouve : 

  • l’alimentation avec ce qui ressemble à une trappe à fusible
  • une prise pour le footswitch (livré, 1 bouton fuzz et 1 bouton boost)
  • une entrée / sortie pour la boucle d’effet
  • un line out (pas encore testé)
  • 5 sorties cab : 2x 4 ohms, 2x 8 ohms, et 1x 16 ohms
Panneau arrière : footswitch, FX loop, line out

Comportement et rendu

Mon setup du moment repose principalement sur l’utilisation d’un Fatboy (2*12) monté en WGS ET-65 et WGS Veteran 30 (2 HP 8 ohms connectés en série).

Grosse claque sur les premiers essais : une distorsion épaisse, une section basse et bas-médium très présente mais pas envahissante, pour un son qui sait rester précis et mordant, et avec une distorsion qui demeure très bien définie (hors fuzz, bien évidemment, et avec un réglage de gain ad’hoc).

Les lampes KT88 ne sont pas réputées comme étant les reines de la distorsion (et elles sont d’ailleurs  plutôt utilisées sur les amplis HI-FI) : le voicing est donc ici clairement donné par le préampli.

Le couple de KT 88 semble disposer d’une réserve de puissance très importante, et même si je n’ai pas eu l’occasion de vraiment pousser, on sent que l’ampli peut sonner très très fort. Le master reste cependant précis et l’ampli demeure utilisable à bas volume / à volume très raisonnable. Difficile toutefois d’en profiter pleinement en appartement sans utiliser une load box, et ce à moins de vouloir se montrer très désagréable avec son voisinage. 

La réserve de gain est importante (mais pas démentielle) et l’ampli supporte bien les pédales d’overdrive. Ces dernières ne sont pas obligatoires avec des actifs très tranchants (EMG81 ou EMG 57 par exemple) mais avec des passifs ou des micros plus sombres une overdrive sera plus que bienvenue (si vous recherchez des sons avec de l’attaque et de la définition, s’entend). Pour du doom/stoner/sludge, vous n’en aurez peut-être pas ou moins besoin et vous apprécierez le coté plus que sirupeux et épais de la distorsion avec le boost enclenché. A ce propos, l’activation du boost ne change pas fondamentalement le voicing de l’ampli mais augmente sensiblement la résonance et peut amener rapidement un coté très pâteux lorsqu’il est utilisé sans overdrive. C’est aussi la signature même de cet ampli : un son très épais ! En ce qui me concerne, il est parfait car justement pas trop transparent: il se montre magnanime en masquant beaucoup de fautes de jeu (attaques approximatives, positions approximatives..)

Alors, s’agit-il pour autant d’un ampli réservé au doom/stoner et autres rythmes lents et fuzzés comme son pédigré semble l’indiquer ? Et bien, à mon avis, non, pas seulement; car il peut restituer beaucoup de sonorités différentes et se montrer suffisamment précis, et ce même pour du trash ou du groove à la Lamb of God (même si il y a probablement des amplis plus adaptés pour cela). Overdrive plus que recommandée dans ces cas-là, tout de même.

Globalement, il présente une signature bien épaisse et convient parfaitement aux riffs et sonorités très heavy, pensez Metallica Sad but True par exemple (“You want heavy ?” (c) James Hetfield). Malgré cela, le bas du spectre reste étonnamment bien défini avec du downtuning (testé jusqu’à drop C pour le moment) mais vous aurez probablement besoin de l’éclaircir avec une overdrive pour ces tunings. Par contre, pour du death ou du trash ultra précis, ce ne sera probablement pas le meilleur choix.

Concernant la fuzz, je ne suis pas spécialiste ou grand amateur : je l’ai testé et elle donne … un son fuzz 😉 . Les interactions fuzz/gain sont intéressantes, et à titre de comparaison on est dans des sonorités assez équivalentes à celle que j’obtiens avec ma seule et unique pédale de fuzz : une Okko Black Beast. Ceci étant dit, les sonorités obtenues par ce biais me semblent plutôt réussies et la palette de sons fuzz+gain est assez étendue.

Petite note : overdrive en entrée + fuzz + gain ne donnent pas de bons résultats chez moi, le son devenant totalement écrasé.

Peut-on obtenir des cleans ? Oui, et je les trouve aussi plutôt réussis, en baissant le gain et en montant le master. Le break-up n’est jamais très loin.

Quelques démos

Les samples ci-dessous sont réalisés par enregistrement direct du Fatboy avec des micros SM57, MD421 et NT1A. Les détails sont donnés pour chaque sample. Le MD421 est positionné sur le cap-edge du ET65 et le SM57 est sur le cap-edge du Vet 30.

Enregistrement des exemples

Le NT1A est positionné à une trentaine de centimètres, pour illustrer le son dans la pièce (je trouve l’enregistrement intéressant mais un peu étouffé, je referai donc une prise).

Note : certains samples ont un niveau de distortion un peu trop élevé pour l’enregistrement de proximité, ce qui donne l’impression d’une saturation un peu sale et brouillonne (ce qui n’est pas le cas a distance d’écoute du cab). 

Note 2 : pour mémoire, je suis un guitariste débutant, restez magnanimes et bienveillants dans votre écoute, il s’agit de découvrir les sonorités de l’ampli.

Les premiers samples ci-dessous sont enregistrés avec le MD421/ET65 et le SM57/VET30, le premier sur le canal gauche à 80% et le second sur le canal droit à 80% environ.

  • Sample 1 : Drop C, SD AHB2, Maxon OD9, dist
  • Sample 2 : Drop C, SD AHB2, Maxon OD9, dist
  • Sample 3 : Drop C, SD AHB2, Maxon OD9, dist
  • Sample 4 : D#/Eb , EMG 57, OD Glove, dist, HPF
  • Sample 5 : D#/Eb , EMG 57, OD Glove, dist, HPF
  • Sample 6 : D#/Eb , EMG 57, direct (pas d’overdrive), dist boost, HPF
  • Sample 7 : D#/Eb , EMG 57, Okko Black Beast (no fuzz), dist, HPF
  • Sample 8 : Drop D, SH4, dist / boost / fuzz divers réglages, HPF
  • Sample 9 : Drop D, Juggernaut neck, dist basse / master monté, HPF (« cleans »)

Sample 10 et 11 : ET65 uniquement – NT1A – « room sound » 

  • Sample 10 : D#/Eb , EMG 57, direct, dist boost, NT1A (« room »)
  • Sample 11 : D#/Eb , EMG 57, direct, dist boost, NT1A , HPF (« room »)

Sample 1


Sample 2


Sample 3


Sample 4

Sample 5

Sample 6


Sample 7


Sample 8


Sample 9


Sample 10


Sample 11


Des démos supplémentaires de cet ampli sont disponibles sur la page “SoundCheck” : https://overdriven.fr/overdriven/index.php/soundcheck/

Conclusion

Un ampli redoutable avec une distorsion très efficace : du trash avec overdrive jusqu’au doom et aux sons écrasés, c’est un ampli très agréable à jouer et à enregistrer. Si la distorsion est capable de rester très définie en étant raisonnable sur le niveau de gain, elle est très bien adaptée aux styles qui exploitent des sons gras, épais, et les power chords ont une présence et une résonance énorme.

Un son massif, un bas du spectre puissant mais pas envahissant et une palette de réglages importante : il mérite le détour et l’écoute !  L’association fuzz/gain propulsée par les puissantes KT88 permet d’aller chercher les sons les plus extrêmes. Si vous êtes versés dans le doom et ces types de sonorités, il devrait vous plaire, mais cela serait certainement réducteur de le cantonner uniquement à ces styles.

Un second post sera publié pour illustrer les sons obtenus avec d’autres cabs, IRs et tunings ainsi que pour tester le lineout. La construction et la finition sont irréprochables et semblent un bon cran au dessus des Diavlo. 

Lancé aux alentours de 1000 – 1200 Euros, on le trouve en occasion dans les 600 / 700 Euros et également neuf à 880 Euros en ce moment sur amazon.fr  par exemple (1er mars 2020).